Anna LivebardonPoésieDe Tous Les Jours → PREFACE

PREFACE

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PREFACE

Nous sommes au pays des poètes. Rien ne me surprend plus, même quand Anna LIVEBARDON vient m'offrir une strophe où le rêve fait éclore la meilleure pensée. Et cela me rappelle qu'un jour, chez Jane Hyrem, rue Vaugirard, Alcanter de Brahm, me soufflait à l'oreille, alors que Jehanne Grandjean disait un poème sur mon beau et vieux Quercy : « C'est là que tous les poètes devraient habiter ».

Je ne pense pas qu'il soit de joie plus grande, plus noble, ni plus authentique, pour un préfacier comme moi, que celle de découvrir chez un auteur, un talent qui s'affirme, puis se confirme de poème en poème. Je connais Anna Livebardon depuis peu, et j'ai senti que dans son cœur régnait la poésie. Elle n'a peut-être pas toujours observé les règles, mais le rythme du vers — cette musique, sans quoi il n'y a plus rien — est le propre de ses poèmes. Ce qui m'a frappé chez elle, c'est l'exquis sentiment, fin, neuf, assez exceptionnel, que j'ai rencontré tout au long de ce livre, divisé en six chapitres. Pour moi, le meilleur est le deuxième chapitre. Elle retrace une vie, elle fait revivre l'homme qu'elle a aimé et elle lui dit que même, lui mort, son amour ne finira jamais. Elle m'a fait penser à Anna de Noailles qui cherchait dans la mort, le sentiment de l'amour.

Un ange dans les cieux qui m'arrachait le cœur.

J'ai trouvé dans ce chapitre, des poèmes courts, qui sont les meilleurs d'Anna Livebardon; un bijou dans un écrin, la strophe de huit à vingt vers, m'apparaît comme une illumination, où l'esprit évoque les heures heureuses d'une vie. Or, c'est au Quercy que pense Anna Livebardon dans ses poèmes, enrichis de souvenirs intimes et d'une soudaine profondeur d'âme.

Le poète — on le sent — maîtrise son inspiration pour n'enrichir que des pierres sculptées de rosaces ou de guirlandes, dans ses strophes brèves. A l'opposé de la facilité, on aboutit à la plénitude.

La seule fois que j'ai rencontré Louise de Vilmorin chez Drouant, un jour qu'on décernait le Goncourt, c'était pour lui entendre dire: « La poésie est le maquillage idéal qui transforme un caillou en étoile ». La poésie d'Anna Livebardon est un flamboiement d'images neuves, peu de lyrisme, mais une incantation profonde, une concision sympathique, qui fait aimer la poésie de cette poétesse cadurcienne. Elle s'est promenée de Lasbouygues au Majou, de Saint-Cirq-Lapopie à Boissières, de Marcilhac à son Auvergne chérie ; deux magnifiques provinces, dont elle a su tirer le climat poétique.

Sa plume est tellement imprégnée de poésie, que son vers flambe merveilleusement, comme une étoile qui brille dans la constellation des poètes. C'est une poésie suggestive, aux images flottantes qui cernent une pensée précieuse. C'est un excès verbal, sans influence, qui confère à cette poésie originale, son caractère propre.

Elle a chanté avec passion la terre de Grèce, la nature des Dieux, avec l'Hellade, est splendide. Et comment ne pas citer ici, cette Athènes merveilleuse, si scrupuleusement sentie avec sa sensibilité de poète... L'Egypte lui a donné un autre tableau d'un art puissant. Que se soit en Auvergne, en Quercy, sur le Bosphore ou ailleurs, Anna Livebardon fait de la nature qui l'entoure, une fête et quelle fête !...

N'allons pas jusqu'au bout du livre, il est de la même trempe et nous y découvrirons le rêve, comme si nous avions vécu nous-mêmes, ces heures admirables d'amour et de vacances.

Ne me demandez pas ce qu'il restera de ce rêve, je vous répondrai — et ce sera ma conclusion — il en restera toujours sous la plume d'Anna Livebardon, des vers qui vous enchanteront et le souvenir charmant d'une promenade que vous aurez faite dans son jardin.

Jean MOULINIER,
Modérateur de l'Académie
des Belles Lettres du Quercy

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